La ministre de la Culture nous a gratifiés hier d'un alignement
des poncifs à la mode sur le numérique, les jeunes et les nouveaux usages que
tous les politiques et les chroniqueurs en vue nous infligent ces dernières
années. Et le ton et la conviction qu'elle mettait à lire son texte laisse
songeur sur la part personnelle qu'elle y avait mise...
A l'issue de ce
florilège culturo-geek, on se serait attendu à ce que madame Nyssen nous
annonce l'intégration de l'audiovisuel public au CNDP !...
Mais,
trêve de plaisanterie, la ministre a tout de même annoncé rien moins que la
suppression de deux chaînes, France 4 tout de suite, où 25 salariés devront être recasés (conducteurs, programmation, programmes...) et France Ô bientôt. France
3 national semblant promise au même sort avec la déportation de ses moyens vers
les régions et France Info.
Ces annonces s'inscrivent dans une
funeste tradition d'arbitraire de la part de l'État français. Les
gouvernements, quels qu'ils soient, annoncent un jour la création de nouvelles
chaînes de façon toute aussi impromptue qu'ils peuvent annoncer le lendemain
leur disparition. Où vont-ils chercher la justification de ces choix
stratégiques ? Chez les professionnels de l'audiovisuel public qui le font
vivre au quotidien ? Non ! Auprès de leurs représentants au fait des enjeux
techniques, économiques et sociaux ? Non ! Quoi de mieux qu'une
commission d'experts composée d'ex-dirigeants chapeautés par des conseillers de
l'Élysée et de Bercy ?
Certes, il est légitime que l'exécutif
avance des stratégies pour l'audiovisuel mais, aujourd'hui comme hier, c'est
l'unilatéralisme qui prévaut. Les acteurs au quotidien de l'audiovisuel n'ont
en rien leur mot à dire. On ne voit vraiment pas ici ou est " le nouveau monde
" !...
L'engagement des salariés dans des chantiers lancés un
jour puis abandonnés le lendemain est en pure perte. Pourtant, l'expérience et
les expertises développées par ces salariés seraient précieuses pour éviter des
aventures échafaudées dans le secret des alcôves du Pouvoir et dont le
caractère improvisé finit par générer des dépenses en cascade.
Les salariés de l'audiovisuel public
n'ont aucune leçon à recevoir même s'ils ont plus de 50 ans !) sur le
numérique, les publics et leurs usages et les nécessaires adaptations.
Ils connaissent tout cela bien mieux que ceux qui leur en parlent et ils
ont toujours été au rendez-vous des évolutions. Ils sont juste fatigués
d'être traités de plus en plus comme des hochets avec le sentiment qu' un
projet dans lequel ils s'étaient totalement investis est jeté à la poubelle
parce qu'une sommité bien en cour vient d'avoir une nouvelle idée de génie.
A cette
impéritie programmatique s'ajoute le stress d'une nouvelle réduction de moyens
annoncée.
L'audiovisuel public ne serait pas en situation de devoir
rechercher des économies drastiques si l'on n'avait pas multiplié les
revirements stratégiques toutes ces dernières années. Il est cocasse, à ce
titre, de voir Marc Tessier , tel Pénélope, défaire ce qu'il avait fait !...
La prise en compte de l'avis des salariés et de leurs
représentants aurait pu éviter des évolutions aussi erratique que coûteuse.
Mais au fur et à mesure que se succédaient les chantiers, le dialogue social
est devenu de plus en plus virtuel, les lois sur la représentativité des
organisations aidant...
A ce titre, il est significatif que rien
n'ait été précisé hier sur la gouvernance et sur les arbitrages budgétaires.
Sur ces sujets fondamentaux, le couperet nous tombera dessus sans doute
aussi brutalement qu'il est tombé hier sur les contenus.
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