Réforme de l’audiovisuel public:
À contre-jour et à contretemps
Hier, en fin de matinée les Présidents de l’Audiovisuel Public sont venus
prendre leurs lettres de missions rue de Valois, dans une ambiance très
cinquième république, mais plutôt du début cinquième, que n’aurait renié ni
Michel Debré, ni Alain Perrefitte et surtout pas le Général ! Tels des préfets
de l’Audiovisuel, elles et ils ont tous joyeusement abondé dans ce grand plan
dont personne ne sait, ni comment, ni pour combien, il sera réalisé.
Et ce pour une simple raison, c’est que cette grande ambition de la Télé
publique 3.0 est d’abord fondée sur un plan drastique d’économies que nous
allons, nous salarié(e)s, continuer de subir. Faire de la télé, de la vieille
télé, mais aussi de la nouvelle télé, du web, de la tablette, du smartphone,
mais en faire toujours plus avec toujours moins. Et sans se plaindre sous peine
de passer pour des archaïques.
Ah les salarié(e)s de France Télévisions qu’ils soient sur les plateaux,
dans les services dit supports administratifs, à l’Info, en outremer, aux Magazines,
aux Sports, n’ont pas la chance des producteurs privés qui, eux, vont
bénéficier d’un budget « sanctuarisé ». Du coup, la première annonce
de Françoise Nyssen lors de cette présentation, n’était autre que l’assurance
au privé qu’il continuerait bien de bénéficier de la manne d’argent public de
la redevance. Dans les dîners en ville on peut desserrer la ceinture.
Pour le reste, si les intentions sont louables, explorer de nouveaux
territoires de la création, innover etc... La question reste entière, avec
quels moyens ? Certes la ministre a semblé vouloir déverrouiller le carcan des
décrets Tasca et permettre à FTV d’exploiter enfin les droits de ses
productions mais là encore sans plus de précisions. Doit-on être confiant dans
cette promesse, ou bien ce paragraphe ne risque-t-il pas d’être
« glyphosaté » par les lobbies privés dans la future loi ? Car dans
les dîners en ville, on ne choisit pas, c’est fromage et dessert.
Sinon réjouissons-nous, les Régions vont enfin faire de la télé
régionale, 6h par jour, avec France Bleu et d’ici septembre, mais là encore
avec quels moyens ? Mystère. Ou alors avec la peau de qui ?
En somme Françoise Nyssen annonce une grande réforme mais la loi viendra
après, elle donne un cap mais sans garanties, ni annonce de réforme de
financement. Elle décrète que France TV va parler aux jeunes alors que le
groupe re-signe ses plus gros contrats avec des animateurs que l’on voit à
l’antenne depuis les années 60 ou 80. Et que les nouveaux qui arrivent
appartiennent tous à « des écuries de prod’ », issues du royaume de
l’entre-soi.
Françoise Nyssen confirme dans les missions premières de la télé publique
l’information et la liberté de ton, alors que les journalistes et les équipes
des rédactions nationales, des magazines et de la chaine info, tirent la langue
chaque jour face aux coupes financières rampantes. Nous rappelons que le
meilleur checkeur de fake news est le journaliste de terrain
compétent parce qu’il connaît ses dossiers, les interlocuteurs et qu’il a le
temps de remplir sa mission.
Au milieu de cela il y a aussi une sourde menace, celle de la braderie
des bijoux de famille :
Que veut dire « libérer le canal de France 4 » ? Y installer
une autre chaine du groupe ou plus simplement l’offrir au privé ? Un canal
stratégique, le 14, qui fait des envieux...
Que veut dire « il reviendra aux téléspectateurs d’outremer et aux
élus de décider s’ils veulent conserver France Ô ? ». Doit-on comprendre,
si vous en voulez, vous le financez, vous, les collectivités locales ? Un
modèle d’ailleurs dont on peut parier qu’il s’appliquera pour les régions de
France 3. On essaiera après cela de développer la liberté de ton de l’info quand
le financeur est l’élu du coin ?
En plus d’être cadrée à total contre-jour, Françoise Nyssen, par des
annonces non étayées et qui masquent mal des intentions ambigües, apparaît
surtout, terriblement à contretemps.
Des Elu(e)s du CE Siège ressentent une certaine défiance devant cette
liste de courses et doivent plus que jamais se montrer vigilants, en période de
disette financière, devant les appétits du privé.
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